Sous ses allures d'éternel jeune gamer qui ne sort pas de sa chambre, Vald va fêter ses 33 ans demain (15 juillet). Au-delà de son âge, le rappeur d'Aulnay-sous-Bois a déjà une sacrée carrière derrière lui, avec plus de 13 ans passés à balancer des morceaux. Avec un certain succès, il faut le dire, au point qu'il est presque devenu un artiste mainstream, que certains gens kiffent alors que "à la base, moi j'aime pas trop le rap", un peu à l'image d'un Orelsan par exemple. Pourtant, le V reste avant tout un putain de rappeur, avec une vraie plume, des textes souvent lourds de sens (ou complètement débiles, ça alterne), et on vous a fait une petite sélection de 10 morceaux sans trop d'autotune ni de mélo, où le boug ne fait que kicker, histoire de vous rappeler qu'il est bien un des meilleurs rappeurs de France.
Journal Perso
On était un peu obligés de commencer par ça, car pour beaucoup de gens, c'est avec ce titre, et ce clip, qu'ils ont découvert Vald. Et on peut dire que l'entrée en matière est plutôt violente, et un peu absurde, un peu comme la société dans laquelle on vit actuellement. Dans ce titre, le V montre toute l'étendue de sa technique, déjà très solide à l'époque, avec des rimes sur plusieurs syllabes, mais c'est surtout cette haine qui transpire de chaque mesure qui marque les esprits. Avec un goût prononcé pour la provocation, comme lorsqu'il compare les rappeurs qui "chialent" aux shlags du métro.
Aulnay-sous-Bois
On passe au deuxième projet de Vald ce titre extrait de sa tape "NQNT". Là encore, c'est une masterclass, avec cette chanson qui parle de sa ville, mais qui est surtout un prétexte pour allumer la gangsta rap et le rap "de caillera", en les accusant d'être devenus les parodies de ce qu'ils décrivent dans leurs textes, désormais fiers de fumer du shit et de le vendre, alors qu'au départ le gangsta rap était plutôt un moyen de retourner ce cliché pour faire peur aux "bobos" en jouant sur les préjugés, tout en leur prenant leur argent avec ce gangsta rap "à sensations". Le tout, très bien rappé, sur une belle prod de Dolor et BBP, dans un format qui correspond complètement à un morceau de rap "traditionnel".
Shoote un Ministre
Avec l'âge, la haine de Vald semble s'être un peu apaisée (quoique...), mais à ses débuts, ses textes étaient extrêmement violents et provocateurs. Et c'est un peu ça qui caractérise le rap, ce goût pour la provoc, histoire d'attirer l'attention. Avec "Shoote un ministre", le V tape dans le mille, et le texte n'a d'ailleurs jamais été autant d'actualité qu'aujourd'hui. Pas son texte le plus technique ou le mieux écrit, mais c'est sincère, et le refrain fait tellement plaisir : "tu fais ptet un truc bien, frelon, shoote un ministre". Finalement, conscient que la société pousse les gens à de plus en plus de violence, il les incite à diriger leur violence sur les "vrais responsables". Curieux d'ailleurs qu'il n'ait pas pris de procès pour le texte.
Vitrine, feat Damso
On retrouve le V quelques années plus tard, avec un style un peu moins old school, un peu moins "traditionnel", un peu moins "instru piano/violon et flow un peu monocorde". On peut dire qu'il a musclé son jeu ! Avec "Agartha", Vald frappe très fort, avec un premier véritable album très solide, rempli de gros titres. Et parmi eux, forcément, "Vitrine" a des allures de hits. Clairement un des titres les plus marquants du V, et sous ses allures de tube, ça ne l'empêche pas de balancer de sacrées lignes : "les jambes toujours plus ouvertes comme rappeur en déclin", par exemple. Un vrai couplet bien maîtrisé, dans la tendance, une très bonne prod de Seezy, bref, 10/10.
Plus Haut, feat Alkpote
2017 était l'année où Vald a clairement assis sa domination sur le rap game, au moins dans le public. Entre "Agartha", et ses nombreux feats, il a montré à tout le monde où est-ce qu'il se situait dans la chaîne alimentaire du rap game : en haut. Pas un hasard si on le retrouve en compagnie d'Alkpote plusieurs fois dans sa carrière : lui aussi est un fin rimeur, amateur de rimes multi-syllabiques et de lignes qui frappent fort. En vrai, le V a plusieurs fois cité l'Empereur en référence, et quand on voit cette connexion, remplie de réfs complotistes et de lignes provocatrices, on comprend pourquoi ! A l'époque, la sortie du morceau avait été saluée par tout le monde.
Réflexions basses
Le V de Xeu avait encore pris un peu de bouteille par rapport à celui d'Agartha. Très légèrement plus mature, mais toujours aussi cynique, aussi désabusé et dégoûté par la société qui l'entoure et surtout, très insatisfait de son statut de star, de "génie du rap", acquis grâce à son précédent album. Lui voit bien qu'il est toujours le même branleur parfois indécis, qu'il est peu à peu en train de rejoindre les "élites" qu'il critiquait dans ses précédents morceaux, et ça ne lui convient pas. Plus il est célèbre, plus il s'enfonce dans ses démons, notamment la défonce et la solitude, avec cette impression que personne ne le comprend. Encore du très bon taff d'écriture, avec ette instru piano-bar signée Seezy.
Iencli, feat Sofiane
C'était peut-être le dernier artiste qu'on pensait entendre rapper dans le projet "93 Empire" au milieu de tous les gangsta rappeurs du 93. Mais il nous livre une vraie masterclass, en compagnie d'un Fianso enragé comme toujours. Encore un nouveau flow de la part du V, en mode revanchard et énervé. Ce morceau, c'est "le soulèvement des iencli", et qui de mieux que Vald, qui a toujours refusé qu'on l'associe aux bicraveurs, pour le porter. Ce quie st encore plus étonnant, c'est que Fianso se sent aussi très bien dans l'ambiance, mais quand on connait la complicité entre les deux artistes, ce n'est pas étonnant. Un titre qui avait choqué pas mal de monde à l'époque de sa sortie !
L'addition, feat Heuss l'Enfoiré
On n'avait dit pas trop d'autotune ni de mélo, et on en a mis le moins possible. Mais on était quand même obligés d'en mettre un tout petit peu, d'autant que les deux artistes n'en ont pas trop abusé sur ce titre. Surtout, le V nous sort un nouveau flow, inspiré par Heuss, alors que les deux artistes sont à leur prime, et n'oublie pas de lâcher quelques punchlines bien piquantes comme "C'est tous des thos-my derrière le cro-mi, ça joue les Tony, ça gratte les APL". Encore un texte dans lequel il parle de cette course à l'oseille qui rend fou la plupart des humains, dont lui-même, même sil essaie de prendre du recul avec humour. Un morceau qui aurait dû beaucoup plus buzzer s'ilne se situait pas sur "En Esprit", l'album de Heuss, lui-même rempli de gros titres qui ont un peu caché celui-ci.
Jean Teh
Le Vald à la fois dépressif et extra-lucide, drogué, qui s'en fout de tout, même du tempo de l'instru et d'être dans les temps, c'est clairement une des meilleures versions du V. Dans "Jean Teh", c'est exactement ce que le rappeur nous propose. Avec ce refrain entêtant, bien provocateur, cette manière de kicker nonchalante, sur un texte toujours aussi bien écrit, il montre que même en faisant n'importe quoi il reste au-dessus du lot. Et ça, sans faire de compromis sur le message ou les réfs : "fils de pute, comme carapace bleue", ça vient de nulle part et c'est incroyable.
Regulation (Reloaded)
Si on a surtout mis des titres un peu datés dans notre liste, ne croyez pas pour autant que Vald a arrêté de rapper. C'est vrai, il est longtemps parti dans une vibe un peu plus "grand public" au niveau des sonorités, avec plus de mélo, et un peu moins de kickage. Mais c'était pour mieux revenir choquer la France en 2025 avec un album rempli de rap. Notamment le morceau "Régulation", qui a encore pris une dimension supplémentaire après avoir été remixé par Vladimir Cauchemar pour une version" Reloaded" qui tourne beaucoup en festival. On n'est pas très fan de tout le morceau, mais l'insolence avec laquelle Vald allume la concu, tout en faisant de l'ironie sur le thème de la "régulation de population", un sujet complotiste qui revient très souvent, c'est assez fort. Et sur scène, ça envoie, il faut le dire.

























