Premier album pour Darryl Zeuja et aussi changement de nom pour celui que l'on connaissait sous celui d'Areno Jaz. Si le nom de change, c'est parce que la musique évolue. Depuis la fin de l'aventure 1995, il n'a pas forcément été le plus productif en solo, mais il a mis ce temps à profit pour définir une nouvelle direction à donner à son rap. Et cela donne "Chilladelphia" disponible depuis le 29 mai 2020.
Qu'as-tu fait depuis la fin de l'aventure 1995 ?
J’ai surtout travaillé au développement de mon label Jihelcee Records que j’ai fondé en 2010. J’ai produit plusieurs artistes dans des styles divers et variés, du rap à la musique instrumentale et j’ai aussi sorti quelques singles en solo pendant que j’élaborais mon nouveau style.
Pourquoi as-tu préféré une autre aventure de groupe à une aventure solo ?
J’ai voulu lancer le projet XLR "Rue du bon son" pour mettre en avant mon label et certains des membres avec qui j’allais être amené́ à travailler. Ce n’était pas vraiment réfléchi mais je ne voulais pas faire de projet solo car j’étais encore très actif avec 1995 et en même temps, j’ai rencontré́ les membres d’XLR donc ça s’est fait assez naturellement.
Tu as sorti des EP et des singles en solo mais pourquoi as-tu autant attendu avant de lancer ton premier album ?
J’ai attendu aussi longtemps pour sortir mon premier album car je voulais être au top de ma forme tant au niveau artistique qu’en termes de production ou de distribution. J’ai toujours voulu être le plus indépendant possible alors il a fallu que j’apprenne à maitriser plusieurs domaines, de la musique aux clips en passant par l’organisation d’événements live. Je voulais aussi ramener autre chose que ce que j’avais pu faire ou entendre avant, alors j’ai pris mon temps pour avoir quelque chose de frais et novateur.
Tu as pris ton temps pour le travailler, qu'as-tu fait durant cette période ?
J’ai travaillé́ sur ma vision de la musique, du monde et de l’art en général. J’ai lu des livres, j’ai regardé́ des films et des documentaires, j’ai réfléchi et surtout j’ai travaillé́ et perfectionné mon écriture et ma compréhension poétique.
As-tu rencontré des difficultés ? Si oui, lesquelles ?
Oui, beaucoup. D’ordre familiales suite au décès de mon grand-père, de ma grand-mère et de ma tante ; mais aussi personnelles suite à une hospitalisation ; et enfin culturelles car beaucoup des gens qui m’entouraient ne m’ont pas soutenu dans mon évolution.
Tu as mis du temps à trouver "ta patte" ? Comment la définirais-tu ?
Disons que j’ai beaucoup cherché mais quand j’ai trouvé́, c’est allé beaucoup plus vite. Je dirais qu’il s’agit d’un retour en enfance ou plus précisément d’un adulte qui a gardé́ sa part d’enfant. Le monde dans lequel nous vivons est parfois compliqué et violent et c‘est une façon pour moi de rester à l’écart et de protéger mon univers et mes idéaux de l’inévitable désillusion du monde adulte.
Qu'est-ce qui change dans ce projet selon toi ?
Dans ce projet je suis plus moi-même et j’essaie de moins suivre les "codes du rap" tant au niveau musical que textuel ou poétique. Je n’essaie plus d’écrire des couplets de rap mais des chansons à part entière.
Comment peut-on ce changement ?
Ça se ressent surtout au niveau de la tonalité́ et de l’esthétique de l’album mais aussi dans le choix des thèmes, des mélodies et des mots.
Tu dis que tu es reparti de zéro, comment cela se concrétise-t-il ? Qu'est-ce que cela t'a apporté musicalement ?
Repartir de zéro, c’est un peu une façon de parler puisque j’ai quand même gardé tout le bagage rapologique et artistique que j’avais déjà̀ mais ça m’a servi à le compléter et aussi apporter une plus grande compréhension de toutes les formes d’art, ce qui ma permit d’enrichir la mienne.
Comment juges-tu l'évolution des autres rappeurs de 1995 ?
Elle me semble totalement logique, on a tous poussé dans les directions qu’on pouvait déjà̀ apercevoir à l’époque. Je pense qu’on est en train de remplir notre mission d’emmener le rap plus loin que là où nous l’avons trouvé́.
Est-ce que tu leur as fait écouté "Chilladephia" ? Si oui, qu'en ont-ils pensé ?
Je ne leur ai pas fait écouter mais je sais que certains l’ont écouté et me l’ont fait savoir par les réseaux. Les gars ont vraiment kiffé le nouveau style et ça me touche beaucoup car ils font souvent parti des premières personnes auxquelles je pense quand j’écris, surtout certains morceaux comme « La guerre du feu » qui parle d’eux aussi, donc c’est important qu’ils apprécient.
Propos recueillis par Grégory Curot