Vous connaissez certainement Burna Boy, Wizkid et Davido, les fers de lance de la musique urbaine au Nigeria. Ils ont obtenu des succès mondiaux, prenant d'assaut les charts de tous les pays, sans exception, obtenant des Grammy Awards aux Etats-Unis et remplissant des salles partout en Europe et notamment en
France. Leurs parcours ont mis la lumière sur la musique africaine et derrière eux se sont engouffrés des artistes de la jeune génération, tout aussi talentueux comme Tems que l'on retrouve sur le dernier album de Future et qui vient d'obtenir un BET Awards, mais aussi Fireboy dml, Rema ou Ckay. Vous avez un doute sur ce que l'on vous raconte ? Allez juste faire un tour sur n'importe quelle plateforme de streaming et regarder leurs chiffres, vous allez comprendre que leur musique dépasse largement les cadres de leur pays ou de leur continent.
Pheelz, qui était récemment dans les locaux de Generations, reconnaît que les influences sont multiples et que le succès des uns aide les autres et inversement.
"On a tous beaucoup d'influences différentes : il y a I.D Cabasa, Black Coffee, Don Jazzy, 2 face, Burna Boy... Il y a beaucoup d'influences. J'ai l'impression qu'on s'influence tous."
Rema est aussi venu parler du sillon tracé par les glorieux anciens qui a ensuite été largement agrandi depuis par la jeune génération. Pour lui, il n'y a pas de hasard à la réussite africaine et notamment nigériane, il s'agit d'un travail de longue haleine dont les artistes commencent tout juste à tirer profit aujourd'hui.
"On y travaille depuis des décennies. Notre détermination s'est écrit avec chaque génération, de Fela Kutti à 2face Idibia en passant par Wizkid jusqu'à Davido et Burna. On a trouvé un moyen de s'inscrire dans le monde entier et d'avoir une voix plus élargie. Pas seulement dans le monde de la musique, on essaye vraiment de s'inscrire dans les mentalités pour que les gens s'intéressent à tout ce qu'il se passe au Nigeria. Beaucoup d'endroits en Afrique ont été colonisés et les cultures des autres étaient présentes chez nous, maintenant on change le scénario et on met en avant NOTRE culture. On nous a imposé des cultures mais notre culture à nous c'est la musique. On fait savoir au monde entier ce qu'est l'Afrique, par-dessus tout sa musique. On leur montre à travers ça notre style vestimentaire, nos joies, nos peines."
Evidemment, Burna Boy fait figure de "leader" dans ce mouvement. En 2020, il devient le premier artiste africain à atteindre les 100 millions de streams sur la plateforme Boomplay. Il a atteint les 200 millions dans la foulée ou presque. Et chacun de ses projets connaît une progression. Ainsi, "Twice As Tall", lancé en 2020 a été vendu deux fois plus que "Africain Giant". En mai 2021, Spotify sortait un classement qui le mettait en tête des artistes africains les plus écoutés dans le monde.
Vous savez aussi à quoi on reconnaît que les morceaux sont des tubes ? C'est quand les plus grandes stars viennent sur les remix.
Justin Bieber a participé à celui du titre "Essence" de Wizkik avec Tems ce qui a également fait exploser la notoriété de la jeune chanteuse qui a ensuite posé sa voix sur un des titres de l'album de Drake, "Certified Lover Boy". Bieber toujours lui a également fait un remix de "Loved By You" avec Burna Boy. "Love Nwantiti" de CKay a été numéro un des ventes de single en France grâce au remix qu'il a fait avec Franglish, une stratégie totalement assumée par son label qui lui a fait enregistrer des remix avec des artistes allemands, espagnols ou encore arabes. Résultat, le titre est un carton mondial même s'il a mis un peu de temps à prendre. Puis les remix sont entrés en action et TikTok aussi. Le résultat est sans appel...
On ne parle que Nigéria mais il ne faut pas sous-estimer les autres pays africains comme Rema nous l'a rappelé :
"Attention à ce qui se passe en Afrique du Sud, il y a notamment le mouvement Amapiano en ce moment. Le Ghana aussi, la Tanzanie avec Diamond Platnumz par exemple. Il y a beaucoup de pays à suivre et de sons surtout à suivre, beaucoup de genres musicaux viennent d'Afrique et tout revient à sa source actuellement, le monde entier le sait et apprécie cet art. C'est un honneur pour nous tous."
De fait, grâce à TikTok et aux frontières abattues par les artistes nigérians, la chanteuse Amaarae est également entrée au Billboard US. Un petit remix plus tard avec Kali Uchis et Moliy de "Sad Girlz Luv Money" et le morceau prenait encore un peu plus d'ampleur.
Dans le sud du continent, Kamo Mphela, Lady Du et Sha Sha ont alimenté l'explosion amapiano, tandis que l'artiste sud-africain Moonchild Sanelly construit une fan base en Angleterre suite à des collaborations avec Ghetts et Trillary Banks. Et n'oublions pas non plus le buzz autour de Nomfundo Moh, Fave ou Nadia Mukami...
En France aussi le phénomène ne passe pas inaperçu. Burna Boy a rempli Bercy tandis que la musique venue du Nigeria, la simplicité de ses prods, la sobriété des chants a conquis les artistes de l'Hexagone qui s'en inspirent. On peut notamment citer Dadju, Tayc et évidemment Aya Nakamura qui ont fait leurs les bases de l'afro-pop.
Résultat, la musique du Nigeria et plus généralement celle venue d'Afrique est en train de trouver sa place et en passe de devenir une des sources majeures de la musique actuelle. Alors si jamais vous ne connaissez aucun des artistes dont on a parlé ici, penchez-vous dessus car quoi qu'il arrive, ils ont déjà influencé vos artistes préférés...
Grégory Curot