Par SK. Au début des années 1990, la déferlante hip-hop arrivée des Etats-Unis a déjà noyée une partie de l’Hexagone. Cette musique venue des bas-fonds gifle littéralement toute une jeunesse à travers le monde, qui s’identifie à la réalité d’une société où les inégalités s’accentuent et où une partie de la population reste en marge de l’ascension sociale et des privilèges. Souvent sans comprendre un mot d’anglais, parfois en apprenant la langue grâce à la musique, Paris et ses banlieues vibrent au son des premiers MC’s. Cette époque particulière va engendrer de nombreux rappeurs, DJ, graffeurs. Parmi eux, l’un des collectifs les plus emblématique de l’histoire du rap français : Time Bomb.
Assemblé par les DJ Seck et Mars, cette formation forcera les portes de l’industrie pour imposer les artistes les plus brillants de leur génération. Parmi eux, certains demeurent d’incontestables références du rap français.
C’est cette histoire, en réalité cette épopée fugace, que Kamal Haussman, membre du collectif Time Bomb, a choisi de raconter.
Les X-Men.
Rapologies
"A fond dans le bolide fort en score et en chiffres
Même en dehors de l’école donc mono-collègue
On est sur orbite."
"Dieu a béni mon clan", Jeunes coupables et libres, X-Men (1998).
Le Paris des années 1990, c’est la diversité de l’immigration où quelques aventuriers ont réussi à faire leur trou. Les enfants Biloa, fils de la journaliste et Chevalier des Arts et des Lettres et à l'époque rédactrice en chef du magazine Africa International font partie de cette élite:
"Sa famille et lui étaient les seuls Noirs aisés que je connaissais."
Localisés dans le XXème arrondissement, Gilles et Etienne vivent une existence privilégiée essentiellement axée sur la culture. Ce foyer est le pilier autour duquel se crée le collectif Time Bomb. Gilles aka Ill, contracte précocement le virus hip-hop à la source et s'avère particulièrement doué pour la discipline. Du flow aux textes, il est un orfèvre de la rapologie et devient de fait un coach hors-pair qui initie, déniche et recrute les talents. Kamal le décrit comme un artiste méticuleux et un mentor, qui l’initie et le challenge, jusqu’à l’avènement des Jedi et bien après:
"Les X-Men rappaient comme des Américains, mais en français. Leurs mots, sélectionnés pour leur sonorité, sonnaient comme de l'anglais. C'était impressionnant, très beau, mais surtout inédit."
C’est à la maison Biloa que tout se déroule, qu’on se projette et qu’on écoute les dernières cassettes de Hip-Hop tout droit venues des Etats-Unis. C'est d'ailleurs grâce à son ami Etienne que Kamal fera son premier voyage au cœur du fief de Notorious Big, Jay-Z et autres Run DMC, la ville que tout le monde souhaite conquérir, New York. En effet, Dieu a béni le clan Biloa où la matriarche à force de travail s'est érigée comme l'une des plus belles réussites sociales africaines en France. Mais il a aussi béni les enfants et leurs complices sur qui le succès ne tarderait plus à pleuvoir...
"Nous faisons maintenant partie de Time Bomb (...). Mais comment savoir, à cet instant, que cette expérience va changer nos vies, et la face du rap français par la même occasion."