Dans le paysage du rap français actuel, souvent dominé par la vague trap, les histoires sombres du ghetto durant lesquelles on malmène les clients et les flics, les deux rappeurs du groupe Le Club amènent comme un vent de fraîcheur sur tout le game.
La Kanaï et Tayz, deux jeunes de Montreuil, ont en effet une identité qui est très éloignée des standards du game. Loin de jouer les durs, de parler du four à longueur de journée, Le Club met plutôt l’accent sur la vraie vie, les moments de galère au quartier, l’envie de partir faire la fête sur la capitale, les soirées, les rapports avec les filles, avec une simplicité touchante, presque enfantine. Et ça fait du bien, de voir deux jeunes qui ne surjouent pas la carte de la street cred sans donner dans le commercial sans saveur.
Le Club, c’est d’abord un visuel, avec un logo qui rappelle les plus grandes heures de GTA Vice City, à base de néons et de palmiers. Le visuel est d’ailleurs une priorité chez le duo du 93, tous leurs clips ont une ambiance, une patte particulière, très facilement remarquable. On peut parler par exemple du clip ‘’Belles’’, sorte d’énorme Mannequin Challenge dans une maison de poupées géante. L’idée de mettre le paquet sur les clips est excellente, à l’heure où Youtube est devenu une des principales plateformes d’écoute pour le rap.
Mais Le Club est surtout reconnaissable à son style, à mi-chemin entre le chant et le rap, sans abuser de l’autotune de telle manière que leurs voix restent naturelles et agréables. Un pari payant, puisque leur premier titre, ‘’La Magie de paris’’, sorti il y a presque 2 ans, est immédiatement devenu viral. Leur album ‘’Série 97’’ est dans la lignée de ce morceau, assez planant, souvent drôle, et parfois aussi assez mélancolique.
Le projet contient 13 titres, dont 3 interludes. Ça fait d’ailleurs très plaisir de retrouver de vrais interludes dans les projets de rap, un concept qui avait quasiment disparu, et qui rajoute un peu d’âme à l’œuvre. Et sur les 10 titres restants, le duo s’est aventuré sur de nouveaux terrains, comme sur le morceau ‘’Féé d’hiver’’ où on voit que les deux rappeurs sont aussi capables de chanter que de kicker sur une bonne prod bien trap. Parmi les thèmes, on retrouve, pêle-mêle, beaucoup d’egotrip, des histoires de meufs, l’envie de fumer de l’herbe, de planer, de vouloir faire de l’argent sans trop forcer non plus.
Un univers un peu enfantin, normal pour les deux rappeurs nés en 1997, d’où le titre du projet. Ils kiffent la vie, veulent s’amuser, bref, leur musique respire la bonne humeur la plupart du temps. Malgré tout, une certaine mélancolie est omniprésente dans l’album, puisque Le Club ne cesse de parler de leurs envies d’ailleurs, de se barrer loin d’ici. La musique le reflète parfaitement, et d’ailleurs, ils ont expliqué eux-mêmes lors d’une interview, que ce projet est la bande-son parfaite à écouter lors d’un trajet en voiture pour se barrer du quartier.
Le projet est d’ailleurs construit ainsi : il s’ouvre sur des morceaux très joyeux, très planants, avant de finir sur une note un peu plus triste et mélancolique, comme le dernier morceau de l’album, ‘’2047’’, dans lequel les deux potes se demandent où est-ce qu’ils seront dans 30 ans. La réponse : toujours le même galérien pour Tayz. Il est donc urgent de se barrer du quartier.
‘’Série 97’’ est donc une petite balade dans l’univers du Club, dans leur 93 ou dans les soirées parisiennes. Une sorte d’hymne à la vie un peu amère, mais dans laquelle il y a de très bonnes choses à prendre. La Kanai et Tayz s’amusent derrière le micro, ça se sent, et ça donne envie de faire partie de leur team. De l’excellent boulot donc, et on leur souhaite une bonne chance pour la suite, avec peut-être quelques feats pour la prochaine fois, même s’ils n’ont pas besoin de ça pour faire parler d’eux !