Disiz s'explique sur son passage chez Ruquier!

Suite à son passage dans l'émission "On est pas couché", Disiz a laissé un message sur son blog pour expliquer comment il a vécu cette émission de TV...

Voici le message de DISIZ:

 

OK OK OK...

by disiz on 14 septembre 2009, 12 h 35

Merci sincèrement pour tous vos messages, critiques et soutiens….

C’est vrai que je n’ai pas réussi comme je le voulais ce passage télé. Pour être honnête, je ne voulais pas la faire au départ, mais partant du principe que je défends ce que je fais partout et que mon intérêt est que mon livre soit lu, j’ai accepté. Je l’ai préparé. J’y suis allé. Tout allait bien, les critiques sur le “trop appliqué”, que j’ai reconnu et plus au moins bien expliqué en disant que je tenais vraiment à bien faire car l’art d’écrire pour moi est l’art ultime. Je me souviens lorsque vers 17 ans, je tentais d’écrire dans ma chambre, inspiré par tel ou tel livre. Je me rappelle de toutes ces étapes par lesquelles je suis passé pour “m’autoriser-à-penser-que-je-pourrais-peut-être-essayer-d’écrire”. Cette dernière phrase traduit bien le complexe qui m’a bloqué toutes ces années à chaque étape de ma vie. Ce complexe que je suis convaincu de ne pas avoir naturellement. C’est ce même complexe qui m’a eu encore samedi soir.

 

Donc au début, je prends la critique de Naulleau, j’essaye de répondre puis je me fais avoir. Lorsqu’il prend une faute d’orthographe pour illustrer son propos et me faire passer pour un crétin par la même occasion. Je perds pieds, je me vexe et toutes les frustrations resurgissent. Mon livre serait “trop appliqué”. Si je m’étais moins bien appliqué, on m’aurait dit: “Respectez la grande littérature Française, vous écrivez comme un rappeur etc…” et c’est là où est le couac, c’est que justement, j’ai beaucoup de respect pour la littérature Française et que j’aime cette langue, pour sa complexité, ses nuances, l’inépuisable variété d’images et de métaphores qu’elle propose. Une chanson, de rap, limite l’utilisation de cette variété, c’est pourquoi ce livre m’inspirait, parce qu’il me permettait de le faire. Mais la critique de Naulleau (car je savais par ailleurs qu’il appréciait ma musique), m’a ramené à ce que je ne voulais pas. C’est-à-dire, en tant que rappeur, que l’on apprécie en tant que tel, nous nous attendions à retrouver ce style. Ce qui, pour moi, me ramenait à ce carcan, à ce cadenas qu’est mon statut de “banlieusard”, métissé, rappeur, etc…

 

C’est donc moi qui ai mal pris, la critique. Car elle me renvoyait à mes complexes. À ces complexes, que je pensais pourtant avoir terrassé en achevant l’écriture de mon premier roman. Mais je me suis bien berné moi-même, car il ne suffit pas d’un roman, pour balayer, 20 ans de questionnement, de frustrations, de petites injustices, comme l’exemple de la banque et j’en ai d’autres, nous en avons d’autres. Seulement, à juste titre comme certains l’ont écrit dans leur commentaire, ce n’était pas le lieu pour parler de tout ça. Il fallait c’est vrai, parler de mon livre, en faire sa promotion etc…

 

Pour être honnête, à chaque fois que je fais ce genre d’émission, j’ai ce spectre hypnotisant est flou qui me regarde dans les yeux. “Défends les tiens !” qu’il me dit. “Les miens”, sont autant ceux qui viennent du milieu d’où je viens, peu importent leurs couleurs ou leurs sexes, je parle ici de conditions sociales. Dans “les miens”, il y a également des gens comme mes cousins (blancs) ou mes amis de province qui me disent “nous, on ne comprend pas ces distinctions qu’ils font à la télé et en général”. Enfin, quand je dis “les miens”, je parle aussi de ma famille au Sénégal, ou de tous ces jeunes et moins jeunes en Afrique que j’ai rencontré en 10 ans d’aller-retours et plus encore l’année dernière pendant une tournée en Afrique de l’Ouest. Sénégal, Mali, Guinée, Niger, Ghana, Burkina, Maroc, Algérie, Mauritanie, Bénin…


“Les miens” c’est Ali du Niger, bardé de diplômes qui un soir après le concert, vers 3h du matin dans les rues de Niamey, autour d’une dibiterie Haoussa me parlait de la FrançAfrique, du FMI et des Chinois. M’expliquait, que son pays, le Niger, un des plus aride d’Afrique avait le meilleur boeuf et la plus bonne viande en général, car les bêtes et les sols n’étaient pas pollués. Il m’expliquait le système de la dette Africaine. Celle du Niger qui depuis 50 ans demande un emprunt pour construire un barrage qui permettrait aux paysans d’irriguer leurs terres et à l’avenir devenir autosuffisant alimentaire. Mais que l’on accepte de leurs faire ces emprunts, pour des hôpitaux, des orphelinats ou des écoles dans lesquelles on enseigne le Français alors qu’avant d’apprendre le Français, Ali m’expliquait que ses enfants aimeraient d’abord manger. Alors la Chine, qui ne tient pas à exporter les valeurs des droits de l’homme, a accepté elle de financer ce barrage à plusieurs milliards d’Euros. Non pas par philanthropisme. En échange du pétrole Nigérien. Comme d’habitude pour l’Afrique, un mal pour un bien.


“Les miens” c’est Atef jeune étudiant à Science-Po qui vient du 91 et qui à la fin d’un concert m’a dit un jour qu’il avait en partie été motivé à faire des études en n’écoutant certaines de mes chansons.


“Les miens” c’est Anisse, un mec cultivé, aux talents artistiques immenses, chanteur et cinéaste, qui se voit refusé ses scénaris car ils traitent de sujet pas politiquement corrects…
“Les miens” c’est mes petits-frères jumeaux Alhassane et Alhousseynou 2 graphistes, qui, après l’aventure et le succès du Lexik des Cités, avaient pour projets de faire une bande dessinée, mais qui se virent éconduit car le héros de leur bande dessinée n’était pas “caucasien”…


“Les miens” c’est Ona Luambo des Bosquets, qui depuis 3 ans fait son film tout seul, pas en DV en pellicule ! Qui s’est pris des trucs horribles dans la gueule, qui a supporté des réflexions insupportables sur le sujet de son film, par des différents intervenants de l’industrie du cinéma…


“Les miens” c’est ce type que j’ai rencontré &ag